Apnées du sommeil : la maman de Jordan, 7 ans, témoigne

Estelle est la maman de deux enfants, Sarah âgée maintenant de 13 ans et Jordan, plus jeune, âgé de 7 ans. Après un réel parcours du combattant, un syndrome d’apnées du sommeil a tout d’abord été découvert chez sa fille Sarah.* Confrontée au même problème avec son fils Jordan, Estelle partage son témoignage et son vécu, cette fois-ci « différent », face aux professionnels de santé et éducatifs.

« Jordan est un enfant qui avait beaucoup moins d’appréhension sur l’environnement qui l’entoure à la différence de sa sœur. A l’entrée à la petite section de maternelle il parlait très mal. C’était un enfant vif, curieux qui tombait régulièrement malade (angines, bronchites, etc.), avec deux hospitalisations.

Depuis que Jordan est né, il a toujours eu tendance à transpirer énormément, jusqu’à parfois inonder son lit. Nous avons même cru qu’il faisait des infections urinaires, voir même des crises d’épilepsie.

A son entrée à l’école il a eu beaucoup de mal à s’adapter. Au handball il manquait de motivation, d’entrain.

A l’âge de 4 ans en 2017, il a été vu par un médecin ORL pour les troubles du langage. Rien n’est apparu d’anormal, seule l’hypertrophie des amygdales a été mise en évidence. L’ORL constate cependant que Jordan est cerné, pâle, fatigué, des symptômes pouvant faire penser aux apnées du sommeil. Sur sa recommandation, nous allons consulter une pneumologue. Un premier traitement médicamenteux a été mis en place pour dégager les voies respiratoires et voir si cela améliorait sa fatigue.

Entre-temps, la fréquence des épisodes infectieux s’est très nettement aggravée.

En juin 2018, un bilan du sommeil révèle 4 apnées par heure (chiffre qui a pu être sous-estimé car il avait perdu le capteur de saturation en milieu de nuit !). Au mois de juillet, il a été malade pendant une semaine et il a mis 15 jours pour récupérer. Sur cette période il en est ressorti très fatigué : de lui-même il partait faire des siestes (à 11h et 13h30), ou se couchait de bonne heure le soir, à 20 heures.

Trois semaines après cet épisode, on a eu rendez-vous avec le médecin ORL. Sur ses conseils nous avons décidé de lui faire enlever les végétations. Par la suite il a été beaucoup moins malade mais sa fatigue restait toujours bien présente. Par exemple, Jordan s’endormait dans le bus à 16h30 en seulement 10 minutes de trajet.

A l’école, il présentait des troubles de l’apprentissage avec des difficultés à assimiler l’alphabet, les chiffres, ou encore à reconnaître des sons. Un bilan orthophonique a permis de démontrer qu’effectivement il avait des difficultés mais n’était pas pour autant « dans la zone à risque », donc pas de séances. Décembre 2018, nous avons fixé un autre bilan du sommeil qui a fait apparaitre des apnées à hauteur de 11/h. Suite à ces résultats, nous avons décidé de le mettre sous PPC (pression positive continue) la semaine suivante. Il a mis quelques jours pour s’y adapter.

En quelques mois nous avons remarqué beaucoup de progrès : Jordan avait une meilleure élocution, parvenait mieux à se faire comprendre, il était plus attentif, calme et assimilait mieux. Au niveau du sport (handball) il avait plus d’envie, il se défoulait, il donnait le sentiment de prendre du plaisir.

Sur la période scolaire 2019-20, les difficultés sont toujours présentes. L’institutrice nous a même demandé de l’amener au Centre Médico Psychologique (CMP) et nous a proposé une rencontre pédagogique – la deuxième en l’espace de 6 mois – en présence de la psychologue. Lors de la période de confinement, la scolarité est faite à la maison où Jordan avance à son rythme, sa fatigue a été plus facile à gérer. Une prise en charge orthophonique a également débuté au cours de cette période. Durant certaines séances, Jordan ne se montrait pas totalement « coopératif » et sa fatigue était toujours là.

En juillet 2020, grâce aux suivis, à l’écoute des professionnels, le pneumologue et les techniciens de la société prestataire à domicile, la machine à PPC de mon fils a été changée afin de mieux traiter les apnées. Coïncidence ou pas, nous avons ressenti un changement de comportement et surtout sur le plan cognitif : il semble bien mieux comprendre les nouvelles notions qu’il doit acquérir, il appréhende beaucoup moins les difficultés, il devient coopératif et la fatigue est moins présente.

Un élément pour nous important : il arrive à retenir les mots de la dictée d’un jour sur l’autre, ce qui n’était pas le cas de sa sœur au même stade de scolarité.  Lors des séances d’orthophonie les progrès sont notables. Récemment l’orthophoniste m’a dit : « il ne faut pas comparer les deux enfants, ils sont différents… », sauf que voilà il partait vers les mêmes difficultés.

En tant que parents on ne devrait pas comparer mais « grâce » aux difficultés par lesquelles nous sommes passées avec Sarah, l’apnée du sommeil de Jordan a été prise en charge bien plus tôt (à 10 ans pour sa sœur contre 5 ans pour Jordan). Les conséquences sont bien différentes et moins importantes. En lien ou pas, suis-je objective ou pas, quoi qu’il en soit les résultats sont présents, nous les voyons ! »

Alliance Apnées du Sommeil : ce témoignage montre une fois encore que l’apnée du sommeil peut apparaître à tout âge et que les enfants ne sont pas épargnés. Face à des signes comme des difficultés d’apprentissage, des variations d’humeur, des endormissements en journée etc. il ne faut pas hésiter à consulter pour rechercher un éventuel trouble du sommeil.
Malheureusement, à ce jour encore, le manque de connaissance des signes de l’apnée du sommeil conduit trop souvent à des erreurs de diagnostic et à une mauvaise orientation dans le parcours de soins. 
Le sommeil est un paramètre de santé majeur, quel que soit l’âge de la vie. Durant l’enfance, son rôle est primordial dans le développement et la croissance. Ainsi, au moindre doute, il est important de pouvoir en parler à un médecin et de se poser la question de savoir si l’enfant dort bien. Ne pas hésiter par ailleurs à solliciter plusieurs avis médicaux. 

Pour aller plus loin :

*LIRE LE TEMOIGNAGE DE SARAH

L’apnée du sommeil chez l’enfant, pourquoi est-il important d’en parler ? Interview du Dr Annick Andrieux, pneumo-pédiatre à Bordeaux

Apnées du sommeil : des familles témoignent