Apnée du sommeil et surpoids : quels liens ?

Attention aux idées reçues : tout le monde peut être concerné par l’apnée du sommeil, quel que soit son poids !  Dans l’inconscient collectif, le syndrome d’apnée du sommeil est souvent associé à une personne en surpoids. Cette image renvoie à celle du personnage bon vivant dépeint par Charles Dickens, M. Picwick. La proportion d’obèses est, il est vrai, très importante parmi les personnes touchées par ce trouble. De plus, des nuits perturbées bousculent les mécanismes hormonaux régulant la faim et la satiété ce qui modifie nos comportements alimentaires et favorise la prise de poids. Cependant, affirmer que le surpoids est l’unique cause de l’apnée du sommeil est une erreur. L’expérience montre que les liens entre apnée du sommeil et surpoids sont bien plus complexes, faisant intervenir de nombreux facteurs. Nous avons demandé à un expert de revenir sur ce sujet.

Réponses du Dr Christophe Zanetti, pneumologue à Lens.

1.Quels sont les liens entre apnée du sommeil et obésité ?

On parle de surpoids ou d’obésité lorsqu’il existe un excès de poids par rapport à la taille. Pour évaluer cela on utilise un indice assez simple appelé Index de Masse Corporelle (IMC) correspondant au poids (en kg) divisé par la taille (en mètres) au carré (P/Te2) et s’exprimant en Kg/m2. On peut maintenant facilement le calculer sur internet [1] ou avec une application sur smartphone. Le surpoids chez l’adulte est défini par un IMC ≥ 25 Kg/m2 et l’obésité par un IMC ≥ 30 kg/m2 (voir schéma).

Calculez votre IMC :

 

L’obésité est le principal facteur de risque de l’apnée du sommeil. Les graisses accumulées au niveau du cou, du pharynx et du ventre (abdomen) favorisent l’apparition d’un syndrome d’apnées du sommeil en bloquant le passage de l’air dans les voies respiratoires supérieures (nez, gorge) au cours de la nuit.

En effet, selon l’Observatoire du Sommeil de la Fédération de Pneumologie (OSFP), sur un total de 91926 patients :

IMC

 Interprétation

% de personnes avec un syndrome d’apnée du sommeil

< 25

Maigreur / Poids normal

19.57 %

Entre 26 et 30

Surpoids

32.53 %

Entre 31 et 40

Obésité modérée / Obésité sévère

38 %

> 40

Obésité massive ou Morbide

9.89 %

L’apnée du sommeil fragmente le sommeil, entraînant une mauvaise qualité de celui-ci. Or, un sommeil de mauvaise qualité ou en quantité insuffisante a pour effet de diminuer la sensation de satiété et la dépense énergétique (par diminution d’une hormone appelée leptine) et d’augmenter l’appétit (par augmentation d’une autre hormone appelée ghréline). De plus, on a dans ce cas, tendance à se diriger préférentiellement vers des aliments sucrés.

Par la somnolence, l’apnée du sommeil est également un frein à l’activité physique, favorisant ainsi la prise de poids.

Le traitement, associé aux mesures habituelles d’équilibre alimentaire et d’activité physique, va permettre d’améliorer la qualité de sommeil, de réduire les effets précédemment cités et de faciliter la perte de poids.

 

2. Une perte de poids permet-elle pour autant de se passer du traitement par pression positive continue (PPC) ou par orthèse d’avancée mandibulaire (OAM) ?

Oui, chez des personnes obèses, une perte de poids significative peut totalement faire disparaître les symptômes. Dans certains cas, le traitement par PPC peut être arrêté.

Cependant, le syndrome d’apnée du sommeil survient également chez des patients non obèses (voir chiffres ci-dessus). Il est ainsi important de prendre en compte également les anomalies faciales (rétrognathie = mandibule décalée vers l’arrière par rapport à la mâchoire supérieure) et les anomalies ORL (obstruction nasale, hypertrophie des amygdales, grosse base de langue). En leur présence, l’apnée du sommeil ne disparaîtra pas forcément avec la perte de poids.

Dans certains cas, une chirurgie pourra être proposée.

3. Quel est l’intérêt de la chirurgie bariatrique dans le traitement de l’apnée du sommeil ?

La chirurgie bariatrique est une intervention lourde réalisée dans un cadre précis. Elle nécessite l’avis d’une équipe médicale pluridisciplinaire spécialisée et un suivi sur le long terme.

Il existe  actuellement 3 types de chirurgie bariatrique.  Deux interventions consistent à réduire la taille de l’estomac pour réduire les apports alimentaires (l’anneau gastrique et la gastrectomie partielle ou « sleeve-gastrectomie ») et une autre permet d’éviter l’absorption des graisses au niveau du tube digestif (court-circuit gastro-jéjunal ou « by-pass »).

Il n’y a pas de chiffres spécifiques en rapport avec l’apnée du sommeil mais, en France, de nombreux services se sont spécialisés dans la prise en charge de l’obésité avec une prise en charge multidisciplinaire dont fait partie la chirurgie. Au niveau mondial (sur des données de 2011), le by-pass est l’intervention la plus pratiquée (46 %), puis la sleeve-gastrectomie (27 ,8 %) puis l’anneau gastrique en nette diminution (17,8 %). Actuellement, en France, il semble que la sleeve-gastrectomie devienne prédominante.

Les résultats sont variables en fonction des techniques :

  • Avec l’anneau gastrique : les patients perdent entre 20 et 50 kilos un an après l’opération.
  • Avec la sleeve-gastrectomie : environ 60 % de l’excès de poids initial.
  • Avec le by-pass : 50 à 70 kilos dans l’année postopératoire, soit environ 70 % de l’excès de poids initial.

La perte de poids maximale se situe à 2 ans avec un effet rebond (reprise de poids) modéré possible à ce moment-là puis une stabilisation, en général dans les 5 à 7 ans après la chirurgie.

Une analyse récente des études scientifiques (2013) montre qu’en cas d’apnée du sommeil avant chirurgie, on observe une guérison ou une amélioration de symptômes dans 79 à 99 % des cas selon les études. Il est cependant toujours possible que le syndrome d’apnées obstructives du sommeil réapparaisse ou ne disparaisse pas complètement après la chirurgie, soit en raison d’une reprise de poids, soit en raison de la préexistence d’anomalies ORL.

Au-delà du syndrome d’apnées obstructives du sommeil, la perte de poids engendrée par la chirurgie améliore les autres maladies associées et notamment : l’hypertension artérielle (HTA), le diabète, l’asthme. Elle améliore également la fonction respiratoire et la qualité de sommeil même chez les patients qui ne présentaient pas de SAOS au départ.

 

4. Avez-vous un message à faire passer ?

D’une façon générale, une bonne hygiène de sommeil  (couchers réguliers, heures de sommeil suffisantes, absence d’écran dans les heures précédant le coucher, activité physique régulière…) et une bonne hygiène de vie (absence de tabac, sport, équilibre alimentaire) favorisent la qualité du sommeil et évitent les complications liées à une altération de celui-ci, telle la prise de poids. Le dépistage et le bon contrôle de l’apnée du sommeil chez l’obèse l’aideront en ce sens.

Cependant, l’apnée du sommeil existe également chez des personnes non obèses de façon non négligeable. Une perte de poids n’est donc pas toujours suffisante pour faire disparaître complètement les symptômes. Il sera donc toujours nécessaire de consulter son spécialiste après toute intervention thérapeutique pour vérifier s’il y a amélioration ou disparition du syndrome d’apnée du sommeil.

 

[1] Pour calculer son IMC en ligne : ici

 

Obésité et apnée du sommeil : lien utile

Fédération FLONA

One thought on “Apnée du sommeil et surpoids : quels liens ?”

  1. J’ai remarqué que j’avais plus besoin de sucre et que je prenais un peu de ventre, je souffre d’apnée du sommeil, je dors beaucoup mais suis très fatiguée en me réveillant, je pèse 49 kgs au lieu de 47 avant, donc pas obèse, j’attends mon RDV pour être traitée pour l’apnée en novembre, j’ai une vie saine, végétarienne , exercise régulièrement, marché tous les jours… Mon sommeil est plus lourd et plus dérange…

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